Géographie de l'emploi des jeunes urbanistes

Géographie de l’emploi des jeunes urbanistes

Les Instituts d’urbanisme au coeur de l’organisation des marchés de l’emploi régionaux : une analyse des premiers emplois décrochés par les jeunes urbanistes diplômés à la sortie de leur cursus de Master met en évidence le rôle déterminant des lieux de formation en tant que réseaux professionnels.

En offrant 42% des débouchés professionnels à l’échelle nationale, la région Île-de-France semble polariser une majeure partie de l’emploi du secteur de l’urbanisme. Cette répartition géographique des emplois pourvus par les jeunes urbanistes est constante avec la même proportion de recrutements effectués au sein de la région capitale, selon les trois enquêtes nationales du CNJU successives (2010, 2012, 2014). Pour les 1000 diplômés issus des Instituts d’urbanisme, lieux de formation implantés dans neuf régions françaises, l’aptitude à la mobilité géographique semble à première vue décisive.

Mais dans les faits, environ 40% des diplômés d’un Master d’urbanisme sont formés dans un établissement d’enseignement supérieur de la région capitale, selon les données de l’APERAU. On notera aussi que 42% des réponses dans le cadre de l’enquête nationale conduite en 2014 par le CNJU et l’APERAU ont été apportées par des diplômés ayant effectué leur cursus en Ile-de-France, ce qui est un des éléments de la crédibilité de l’échantillon (promotions 2011, 2012 et 2013 de Master).

 

Une distribution régionale des emplois conforme à l’armature urbaine française

Notons que aussi que la distribution géographique des 701 emplois d’urbanistes occupés par les jeunes urbanistes de Master est relativement conforme au poids démographique des différentes régions françaises (en prenant en compte les découpages administratifs antérieurs à la réforme entrée en vigueur au 1er janvier 2016) : les quatre régions les plus peuplées offrent aussi le plus grand nombre d’emplois d’urbaniste.

Régions urbaines les plus peuplées, les régions Île-de-France et Rhône-Alpes se caractérisent aussi par la présence de plusieurs Instituts d’urbanisme sur leur territoire : École d’Urbanisme de Paris (Institut d’Urbanisme de Paris/Institut Français d’urbanisme), Institut d’urbanisme et d’aménagement de l’Université Paris Sorbonne, Institut d’Urbanisme de Grenoble, Institut d’Urbanisme de Lyon.

Région d’exercice des jeunes diplômés de Master occupant un emploi dans le secteur de l’urbanisme en 2014  :

dstribution-geographique-emploi-jeunes-urbanistes-tris-a-platSource : Enquête CNJU-APERAU, 2014. Échantillon : 701 personnes exerçant un emploi dans l’urbanisme au moment de l’enquête

Origine et destination des primo-accédants sur le marché de l’emploi

La compilation des données par région permet de dépasser cette distribution géographique « à plat » des emplois d’urbanistes occupés par les jeunes diplômés de Master :

Dans 7 régions sur 10, les urbanistes primo-accédants sur le marché de l’emploi travaillent majoritairement dans la région de leur lieu de formation en urbanisme (plus de 50% des emplois  occupés). C’est le cas des régions Île-de-France, Alsace, Aquitaine, Rhône-Alpes, Provence-Alpes Côte d’Azur, Midi-Pyrénées et Pays de la Loire (voir graphique suivant).

L’Ile-de-France se démarque cependant en concentrant 80% des premiers emplois d’urbanistes pourvus par les 300 diplômés à l’issue de leur formation délivrée dans cette même région.

geo-emploi-urbanistes

Source : enquête CNJU-APERAU, 2014. Échantillon : 701 personnes exerçant un emploi dans l’urbanisme au moment de l’enquête.

NB : Cet échantillon correspond au premier emploi des 701 diplômés occupant un emploi d’urbaniste que cet emploi soit encore exercé au moment de l’enquête ou non.

Il existe donc bien des marchés régionaux de l’emploi dans le secteur de l’urbanisme. Depuis leur développement dans les années 1980-1990 et les lois de décentralisation, ces établissements délivrent une offre de formation complète dans le domaine de l’urbanisme (DESS, DEA, puis Master, Doctorat) et ont formé plus de 20 000 urbanistes professionnels.

Année après année, les Instituts d’urbanisme ont ainsi contribué à la structuration de véritables réseaux professionnels à l’échelle régionale, participant à la renommée de leur offre de formation et organisant un lien permanent avec le monde professionnel, notamment dans le cadre des ateliers professionnels intégrés au cursus de formation qui donnent lieu régulièrement à une commande publique et dont l’encadrement est le plus souvent assuré par des urbanistes praticiens.

Cette dynamique de réseau est très importante dans le processus d’insertion professionnelle comme en témoignent les enquêtes du CNJU : l’embauche directe suite au stage (un quart des recrutements), via le réseau personnel ou de l’établissement de formation, et la sollicitation directe par la structure pèsent, à eux trois, pour près de la moitié (46%) des modalités d’accès à l’emploi (voir graphique suivant).

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C’est pourquoi le rôle des Instituts d’urbanisme ne doit pas limiter pas à l’insertion professionnelle des jeunes diplômés en formation initiale, mission obligatoire des établissements d’enseignement supérieur depuis la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités.

 

Consacrer les Instituts d’urbanisme comme lieux de formation permanente des urbanistes

Avec l’organisation de forums de métiers et la constitution d’annuaires d’anciens élèves, les Instituts d’urbanisme peuvent garantir des interfaces pérennes entre les employeurs d’urbanistes, les activités de recherche et d’enseignement. Il s’agit à la fois de mieux comprendre les besoins immédiats des employeurs et d’anticiper leur évolution à plus long terme.

Ce dialogue entre Instituts d’urbanisme et employeurs doit être suffisamment opérationnel pour ajuster l’offre de formation initiale mais aussi détecter et formaliser les besoins locaux en matière de formation continue. A cet égard, le développement de la formation continue devrait aller croissant dans un contexte de réorganisation de la maîtrise d’ouvrage publique de l’urbanisme (généralisation des SCoT et des PLU intercommunaux, redéploiement de l’ingénierie territoriale).

Plusieurs d’entre eux, comme l’École d’Urbanisme de Paris (EUP) et l’Institut d’Urbanisme de Grenoble (IUG), se sont déjà engagés dans cette voie en complétant leur offre avec des diplômes en formation continue (de niveau Master ou post-Master type Diplômes Universitaires) ou des parcours en apprentissage inscrits dans le cadre des cursus de Master.

Les Instituts d’urbanisme et d’aménagement du territoire peuvent aussi jouer le rôle de pôles de compétences pour la formation permanente et la mise en réseau des urbanistes professionnels (organisation de débats, visites de terrain, partage d’expériences).

L’organisation du marché de l’emploi dans le secteur de l’urbanisme peut alors gagner en cohérence et fluidité. L’approfondissement des partenariats avec les employeurs locaux d’urbanistes est donc une condition pour dynamiser les réseaux professionnels d’urbanistes et assurer une meilleure gestion prévisionnelle et territorialisée des emplois et des compétences (GPTEC).

 

Pour en savoir plus, retrouvez l’intégralité des résultats de l’enquête